[Castel d'Emerande] Rencontre

" Etes-vous toujours impertinente, jeune fille, ou bien me réservez-vous cette attitude ? "

Le Vicomte saisit son verra, se leva pour contourner le bureau, et prit place sur le meuble, juste devant Dame Thétys.

" Vous vouliez me voir, non ? Hé bien nous voilà réunis, seul à seul. "

Nicholas d'Emerande avala une gorgée de vin et déposa le verre. Ses yeux détaillèrent la noble, d'abord sur les contours du visage, puis glissèrent sur le cou avant de descendre davantage.

" Ce que je ne comprend pas, poursuivit-il d'une voix interrogatrice, ce sont vos motivations. Vouliez-vous me rencontrer pour des raisons professionnelles.... ou privées ? "

Pour la première fois, le Vicomte rendit à la jeune femme son propre sourire.

Une résistante. La demoiselle tentait visiblement d'éveiller ses passions masculines, mais le Vicomte avait connu d'autres femmes et d'autres aventures. Il savait qu'il ne fallait pas se laisser aller à ce petit jeu, d'autant qu'il avait un rang à tenir, et une organisation à représenter.

" Je vous ai montré le verre. J'ai supposé que vous étiez bien assez grande pour vous en servir. "

La galanterie n'était pas son fort. Cependant, il devait admettre avoir manqué de tact vis-à-vis d'un hypotétique nouveau membre.

" Bien. S'il n'y a rien de plus sur le plan personnel, alors les présentations sont faites. "

Le noble conclua sa phrase d'une pointe d'agacement, et s'en retourna derrière le bureau pour remplir son verre.

" Pour tout vous dire, je m'étonne que vous vous intéressiez à notre organisation. D'ordinaire les membres de la Compagnie sont plus... âgés, ils ont déjà en main la conduite de leurs affaires. Quant à vous, j'ai cru comprendre que vous étiez, disons, redevable - le Haut Régent ne voulait pas prononcer le mot vassal - à l'un des membres de votre famille. Ne coyez-vous pas que cela restreint votre marge de manoeuvre ? Qui écouteriez-vous en premier, la Compagnie ou votre suzerain ? "

Le Vicomte se laissa retomber en arrière, et vida son verre d'un trait. L'alcool n'avait visiblement pas encore fait son emprise.

La jeune fille fut déçue de la réaction du Vicomte, enfin, elle n'allait sûrement pas lui montrer cela lui aurait sûrement fait trop plaisir... Elle lui fit donc un large sourire

-Vous qui me disiez petite fille, pardon, jeune fille, vous me trouvez assez grande pour me servir seule...

Lorsqu'il retourna derrière son bureau, la demoiselle soupira, une pointe d'agacement dans la voix et le regard quelque peu mauvais

-Rien de plus sur le plan personnel! Pff, vous ne m'écoutez pas.
Si je veux venir dans votre guilde, c'est parce qu'elle m'interesse, et me conviendrait, mais aussi parce que c'est la votre.

Elle leva la tête, une moue angélique accompagné d'un regard innocent

-Et euh ... je vous trouve charmant aussi...

Faisant mine d'être un peu gênée d'avoir oser révéler ceci, la jeune fille plongea son regard dans celui du Vicomte d'Emerande avant de continuer de faire la timide, le fuyant alors...

-En ce qui concerne mon soit disant suzerain, vous apprendrez que je ne suis vassale de personne. Mon frère m'a "enlevée" j'ai promis de ne pas m'enfuir sans quoi d'ailleurs je n'aurais pu sortir. Rien de plus. Des idées grotesques de l'aîné de Louvelle, vous savez, Andom... Tout ça pour que je ne soutienne pas Fingal!

" Vous me trouvez charmant ? Certes, cela me va droit au coeur. Mais vous faites tant de manière que j'en viens à me demander ce que vous désirez réellement. La timidité ne semble pas réellement vous atteindre, pour le moins. "

Pour la troisième fois, le seigneur d'Emerande remplis son verre et le vida dans la foulée. Les effets de l'alcool se faisaient encore discret, mais pénétraient insidieusement l'esprit du Haut-Régent.

" Mais je sais encore reconnaître une femme qui tente de séduire, ou d'obtenir quelque chose, ce qui revient souvent au même d'ailleurs. Si vous êtes intéressée par cette organisation, nous aurons l'occasion d'en reparler. Toutefois, si vous êtes venu chercher autre chose, il est temps de me le dire plus clairement."

Tout en parlant, le Vicomte fouillait les tiroirs de son bureau, s'interrompant de temps à autres comme s'il avait remarqué une chose intriguante. Finalement, il en sorti une longue dague qu'il , se leva, contourna le bureau une second fois, puis se fixa à hauteur de Dame Thétys.

" Je n'ai pas pour habitude de tergiverser avec les femmes, voyez-vous. Si vous désirez que nous devisions ou parlions d'affaires, sortez de ce bureau et gagnez donc la grande salle. Je vous y suivrais sans tarder. Toutefois si ma personnalité vous intéresse toujours autant, restez ici. Mais alors je vous conseille de vous montrer plus franche avant que je ne prenne les choses en main. "

" Nous parlerons affaire plus tard, alors. "

Le Vicomte sortit la dague d'un geste ostentatoire, s'approcha de la noble jusqu'à ce que son souffle caresse le visage enfantin de la jeune femme, puis posa la lame sur sa gorge découverte. Lentement, Nicholas d'Emerande joua de l'instrument, promenant le métal froid sur le cou de la courtisane, avant de le faire glisser sur sa poitrine et de l'immobiliser au dessus de son corset.

" Dame Thétys, vous me semblez engoncée dans votre robe comme un pauvre chevalier dans son armure. Laissez-moi vous en soulager... "

A chaque instant, le Vicomte s'attendait à essuyer une réaction indignée. Une dernière fois, il affronta le regard de Dame Thétys, presque avec le sourire, tandis que la lame se préparait à déchirer la soie et rompre les attaches du corset.

La demoiselle se mit a sourire, lançant alors un regard encore plus provocateur au Vicomte...

-Une dague ...

Elle effleura du bout des doigts celle ci avant de continuer jusqu'à l'avant bras du vicomte qu'elle écarta doucement, se rapprochant alors plus près de lui elle se mit sur la pointe des pieds afin d'atteindre son oreille. Sa bouche alors à quelques centimètre de celle ci, elle pu lui chuchoter quelques mots

-Ma robe ne vous plaît-elle pas?

La jeune fille lui fit alors un court sourire avant de déposer un léger baiser au coin de ses lèvres

-Enfin, vous allez un peu vite, Vicomte. Si vous m'avez prise pour une vulgaire courtisane vous vous etes trompé... Non pas que je refuse qu'on me fasse la cour, j'attends plutôt qu'on le fasse réellement et non pas qu'on veuille aller trop vite en besogne avec ma personne.

Sur ces mots, elle se rassit dans son siège, attrapant au passage la bouteille de vin et son verre, relevant légèrement la tête afin de voir la réaction de son hôte.

Le Vicomte reprit la dague et la rangea à nouveau. Puis il s'approcha de la jeune femme et tourna autour d'elle, comme un oiseau de proie autour d'un rongeur. Ses yeux détaillèrent les formes de la courtisane avec l'appétit d'un mâle en rut, dont les traces d'alcool avait embrumé l'esprit. Son regard parcourait la noble avec avidité, tandis qu'il s'immobilisait derrière et s'agenouillait à son niveau. Délicatement, ses mains glissèrent sur la nuque de la jeune femme, caressèrent ses épaules et son cou.

" Je ne vous prend pas pour ce que vous n'êtes pas, ma chère. Faire la cour me semble trop long, et attendre m'est souvent insupportable. "

La tête du Vicomte effleura celle de la courtisane, et sa bouche remonta à son oreille. Ses dent happèrent le lobe de la jeune femme et le mordilla légèrement, puis sa langue se faufila doucement, caressant sa peau douce. Ses lèvres se posèrent finalement sur les épaules de la noble, avant que le Haut Régent ne reprenne.

" Finalement, je crois que votre robe ne me plait pas. "

Le seigneur d'Emerande était furieux. Cette femelle osait encore lui resister, alors qu'elle succombait à son charme et savait parfaitement jusqu'où cette situation les mènerait tous deux. Le Vicomte sera le poing, ses lèvres se plissèrent avec l'agacement et son regard se fit menaçant. Il s'approcha à pas lents vers la courtisane qui continuait de sourire. L'alcool faisait son office et son cerveau semblait lui materler le crâne, battant ses tempes avec un rythme effréné. Son souffle se faisait plus court, et la colère montait toujour un peu plus.

Le Haut Régent fit à nouveau face à la jeune Thétys dans une posture de défi. Malgré l'ivresse, il tentait de conserver son port altier, tandis qu'il fixait sa convive avec courroux. Cette fois, les yeux du Vicomte ne se promenaient plus en des endroits incongrus. Ils plongaient, fermement, dans le regard de la Dame.

" Sachez, femme, murmura-t-il, que le Haut Régent de la Compagnie obtient toujours ce qu'il désire. Et il n'est nul besoin pour lui que de se plier aux désirs des autres, pendant des jours, pour parvenir à ses fins."

Le seigneur-marchand appella la garde.

" Vous craigniez que je ne vous oublie ? Vous espériez que je vous retienne ? Très bien, ma chère, vous allez être exaucée !

Plusieurs hommes d'armes firent irruption dans la pièce et s'approchèrent des deux nobles.

" Considérez cela comme une invitation prolongée. A partir de maintenant, vous êtes l'hôte permanante de ce Castel et ce, jusqu'à ce que vous vous décidiez à revenir à de meilleurs sentiments ! Ne vous inquiétez pas, vous serez convenablement logée et traité. Puis il s'adressa aux hommes d'armes. Emmenez-là !

Tandis que l'on raccompagnait la noble vers la porte du bureau, le Vicomte d'Emerande, dont l'alcool et la colère s'entremêlaient dans un amalgame dangereux, haussa le ton. et criait à l'attention de la jeune femme.

" Réjouissez-vous, ma belle, car vous n'aurez plus à vous préoccuper du seigneur Andom ! Désormais, c'est de moi que vous dépendez, et non du fief de Louvelle ! "

Puis il s'effondra dans son fauteil et se resservit un autre verre, tentant de reprendre son calme.

Les servantes parvinrent jusqu'au Vicomte pour l'informer de la requête de ma captive. Le seigneur-marchand s'était installé dans son bureau et grifonnait d'une mine grave quelques document. Lorsque Adélaïde entra en compagnie de quelque domestique, Nicholas d'Emerande leva la tête d'un air furieux puis changea lorsqu'il s'apercut que les nouveaux arrivants étaient appeurés.

" Hé bien, gronda-t-il, que se passe-t-il ?

Ce fut Adélaïde qui prit la parole.

" Votre pri... votre invitée souhaite vous voir. Nous n'osions pas vous déranger, mais elle devient folle, messire ! Elle veut vraiment vous que vous alliez la voir ! "

Le Vicomte posa les doigt sur son visage dans un geste d'immense lassitude puis, après un fort soupir, conssentit à se lever. On le mena promptement jusqu'à la chambre de Dame Thétys, d'où s'échappaient de puissantes invectives féminines. Le seigneur entra brutalement dans la chambre :

" Vous allez arrêter votre rafut, oui ?! Que vouliez-vous me dire ? "

Le Vicomte sourit à son tour.

" J'ai reçu une invitation à l'intronisation du seigneur Fingal, repondit-il. Je gage que votre absence ne sera pas passée inarpeçue et que nous aurons une petite discussion à ce sujet avec votre frère. "

Le seigneur-marchand semblait sur le point de repartir.

" Puisque vous ne semblez pas vous plaire ici, je vous renverrai chez votre frère. Mais il reste un dilemne : si je vous "libère", vous compterez tout raconter, n'est-ce-pas ? "

Le Vicomte d'Emerande avait conscience de sa profonde erreur. Il savait qu'il ne pourrait éternellement retenir sa captive, mais cela signerait alors le début de ses ennuis. Les temps à venir lui parurent désespéremment sombres.

Le regard de la demoiselle voyant le sourire du Vicomte s'amenuiser se refit doux. Elle lui fit alors un large sourire. Tout en se déplaçant dans la chambre, Thétys gardait son sourire, lançant de temps à autre des regards provocateurs au Vicomte

-Bien sûr que oui j'irais crier à qui veut l'entendre que vous m'avez séquestrée... Quoi que, peut être mieux vaudrait-il que nous trouvions un compromis qui nous arrangerait tous deux.
Vous, vous souhaitez que je me taise, ce ne serait en rien une situation réjouissante si je criais a tous que vous m'avez séquestrée, votre réputation en prendrait un coup...
Moi, j'ai besoin d'agrandir mon domaine. Pour cela, il faut de l'argent...

Sur ces mots, elle finit par s'asseoir sur son lit, attendant une réponse du sire d'Emerande.

" Continuez comme ça et je viens vous corriger directement, maudite femelle ! Vous avez déjà de la chance d'être confortablement logée, maintenant taisez-vous ! "

Le Vicomte marqua une pause pour retrouver son calme.

" Ce n'est pas ma réputation qui m'importe. Que croyiez-vous ? Les autres seigneurs se fichent bien de savoir que vous étiez retenue ici. Certains iraient même penser que ce n'était pas tout à fait contre votre gré. Le regard du seigneur se fit plus suspicieux. Ce qui n'est pas entièrement faux. Non, ce qui m'embarasse, ce serait plutôt la réaction de vos frère. Quoique les murs de mon castel résisteraient fort bien à l'assaut de leurs armées, je ne me faits pas trop de soucis pour cela. "

Le Haut-Régent se retourna.

" Bon, je vais devoir y aller. A mon retour, je veux que vous vous soyez calmée. Bonne soirée. "

Plus tard, dans le Castel d'Emerande. Les jours avaient passé, et le Vicomte n'était pas revenu à la rencontre de sa captive. Les mailtraitances à l'encontre des domestiques se firent plus fréquentes, les cris féminins résonnèrent plusieurs fois dans les couloirs du château. Finalement, la porte de la chambre s'ouvrit à nouveau, et un homme de petite taille, mince et élancé apparut dans l'encadrure de la porte. Il s'avanca avec timidité vers Dame Thétys.

" Bonjour demoiselle. Il est le jeune neveu du seigneur d'Emerande. Il s'appelle Aristide. Aristide d'Isabella pour être plus précis. Ou Aristide d'Emerande si vous préférez. "

Il pris une mine plus grave.

" Il vient à vous car il a apprit la mort de Son oncle, il y a plusieurs jours de cela. Il Lui a fallu parcourir une longue distance, mais Le voilà dans le château familial. Son château. Enfin, ne tergiversons pas. Lorsqu'il arrive dans la cours du castel, les domestique viennent L'informer de la présence du captive de sang bleu. Il s'étonne et demande des explications. On les Lui fournit. Voilà pourquoi Il vient à vous. "

Le petit homme scruta la pièce puis revint à la jeune noble.

" Il n'est pas comme Son oncle, donc Il vous informe de votre liberté. Vous pouvez maintenant disposer de votre personne et tout naturellement quitter les lieux. Vous pouvez également vous restaurer, si vous la faim vous tiraille. "

Le jeune homme s'étonna de la réaction de la captive. Il était assez rare de voir des gens se répandre en congratulation au sujet de Nicholas d'Emerande, et encore moins de regretter son absence.

" Il ne sait pas très bien ce qui s'est passé. La missive était assez succinte. De ce qui Lui a été confié, il a compris que Son oncle a perdu un duel contre un certain Fringal... non... Fingal. Oui, Fingal, c'est cela. Un duel perdu, Il sait au moins que ca ne pardonne pas. Il croit que c'était pour une raison amoureuse. Ou alors qu'il y avait une femme dans l'histoire. "

Le jeune noble sembla saisit d'un éclair de lucidité.

" Ne serais-ce pas vous, la fameuse femme ? Enfin, Aristide s'en moque. Le Vicomte est mort, le castel et les terres sont à Lui. Vous ne voulez pas sortir de la chambre, au moins ? "

Aristide était étonné par la requête de la jeune femme.

" Heu... Il ne vous pas connait pas trop, mais vous êtes la bienvenue chez Lui. Passez donc si le coeur vous en dit. Le Castel est assez grand pour accueillir une dizaine d'hôtes. "

Il commenca à s'agiter.

" En revanche, Il a tant de choses à faire et peu de temps pour cela. Il ne pourra vous accompagner jusqu'à votre fief, mais Il peut préparer une escorte pour vous ramener à bon port. Il revient, vous pouvez vaquer à vos occupations en attendant. "

Aristide d'Emerande sortit de la chambre pour faire préparer l'escorte.